Dernier étage de la fusée de « transformation » de la Fonction Publique, le Code Général de la Fonction Publique est entré en vigueur ce 1er mars. La veille, le gouvernement s’auto-congratulait lors d’un colloque dédié, à l’image de la présentation au Conseil des Ministres du projet de loi de ratification de l’ordonnance du 24 novembre 2021. La CGT Fonction Publique alerte les 5,6 millions d’agents concernés sur cette opération de com’ « poudre aux yeux ». Un code à marche forcée. Lors de ce colloque, le Conseil d’État a reconnu « les délais contraints » et le caractère « inachevé » de la codification. En effet, cette dernière aurait dû prévoir la partie réglementaire, avec pas moins de 6 000 dispositions. Malgré cela, le Conseil d’Etat a validé la démarche, avec une promesse pour 2023.
Dans un courrier adressé le 26 janvier à Amélie de Montchalin, ministre de la Transformation et de la Fonction publique, la CGT a rappelé qu’il était peu probable que le gouvernement ignore que seuls les salaires, les pensions, les aides et allocations continuent de stagner ou même de baisser au regard de l’inflation, à décrocher par rapport aux qualifications dans le privé comme dans le public. Douzième année de gel quasi ininterrompu du point d’indice. La situation salariale des agents de la Fonction publique subit une dégradation d’une ampleur inédite. Mêmes constats dans tous les secteurs : l’austérité salariale est de plus en plus insupportable.
Après s’en être pris à nos rémunérations avec, depuis plus de 10 ans, le gel de la valeur du point d'indice et un pouvoir d'achat en berne, le Gouvernement continue le massacre avec l'obligation pour l'ensemble des collectivités et établissements publics d'augmenter le temps de travail.
Alors que le gel de la valeur du point d’indice poursuivi presque sans interruption depuis plus de 10 ans entraîne des pertes de pouvoir d’achat considérables, le rendez-vous salarial n’est toujours pas fixé. D’abord envisagé au début du printemps par la ministre, celui-ci pourrait n’intervenir que début juillet ! Un tel calendrier augure mal de la possibilité de négocier réellement. De surcroît, dans les thèmes qui seraient abordés, le pouvoir exécutif est totalement muet sur le chapitre des augmentations générales. Ce silence obstiné, en dépit des demandes réitérées de l’ensemble des organisations syndicales, est bien le signe que le gouvernement n’a aucune intention de procéder à des revalorisations du point d’indice, y compris pour 2022. Cette situation est inacceptable !
La loi dite de transformation de la Fonction publique entend bien transformer, c’est-à-dire changer la nature de la Fonction publique territoriale. Le gouvernement prévoit pour la fin d’année de faire passer une ordonnance portant « codification » du statut. Le passage du statut à un code, c’est le passage des droits collectifs attachés à la personne à des pseudos droits renégociables attachés à la collectivité ou à l’administration. La transformation du statut en code c’est la fin du droit à la carrière, aux avancements, la fin des commissions de réforme, la fin de nos instances paritaires, c’est la fin du Conseil supérieur de la Fonction publique territoriale, c’est l’ouverture à marche forcée à la mise en concurrence entre les salariés, les contractuels, les fonctionnaires.
Les dispositions des titres Ier et II du présent décret entrent en vigueur en vue du prochain renouvellement général des instances de la fonction publique. Les dispositions des titres III et IV, à l'exception des articles 82 et 83, ainsi que celles des articles 101, 102, 104 et 105 entrent en vigueur le 1er janvier 2023. Jusqu'au prochain renouvellement général des instances de la fonction publique, les dispositions des articles 82 et 83 s'appliquent aux comités techniques et aux comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail.
La commission exécutive fédérale réunie le 14 janvier 2021 constate que les mobilisations qui ont démarré dans quelques collectivités en 2020 contre l’augmentation du temps de travail liée à l’application de l’article 47 de la loi dite de transformation de la fonction publique tendent à augmenter. Les uns après les autres, les employeurs publics annoncent qu’ils vont devoir se plier à la loi, c’est-à-dire supprimer les accords dérogatoires aux 1 607 heures. Selon des mairies, cela peut représenter jusqu’à 12 jours de congés supprimés. Plus de 30% des collectivités territoriales sont concernées.
Le Gouvernement poursuit sans relâche la mise en œuvre de la loi Dussopt dite de transformation de la fonction publique.Après la présentation devant le CSFPT en novembre 2020 d’un projet de décret vidant les CAP de leurs compétences en matière de promotion et supprimant les Conseils de discipline de recours, le Gouvernement s’apprête à faire disparaitre les Comités techniques et les CHSCT. La formation spécialisée n°2 du CSFPT du 8 décembre est en effet saisie d’un projet de décret de pas moins 105 articles portant création de Comités Sociaux Territoriaux (CST). Il s’agit là de la même logique destructrice conduite dans le privé appliquée à la fonction publique. Il s’agit là d’un vaste processus de régression des libertés syndicales. Et en matière de santé au travail, c’est un véritable retour au passé.
Réunion audio entre la ministre de la transformation de la Fonction Publique et les organisations syndicales CGT, CFE-CGC, FAFP, FO, FSU, Solidaires, CFTC, CFDT, UNSA En pièce jointe les interventions : de Natacha Pommet, secrétaire générale de la Fédération CGT des Services publics, et de Mireille Stivala, secrétaire générale de la Fédération CGT Santé Action Sociale Ainsi qu’un compte rendu succinct de la première séquence de la réunion unitaire.
La loi de transformation de la fonction publique vise à transformer la gestion des ressources humaines des collectivités territoriales. Son objectif est de la rapprocher du fonctionnement des
entreprises privées concurrentielles.
Cette loi élargit la possibilité hallucinante de nommer des gens n’ayant pas la qualité de fonctionnaires dans les emplois de direction de la fonction publique territoriale. Incitation au départ
volontaire, recours aux contractuels libéré, rupture conventionnelle, alignement des instances de représentation du personnel sur le secteur privé, tout est entrepris dans cette loi pour rendre
la gestion du personnel des collectivités locales quasiment identique à la gestion d’une entreprise. C’est d’ailleurs ce qu’annonçait ouvertement le rapport parlementaire Belenet Savatier : « La
fluidité entre la fonction publique et le secteur privé apparaît comme l’une des options au service de l’ouverture et de la performance des organisations ».
Ce rapport suggérait également de diversifier le recrutement dans les collectivités en adaptant les modalités de recrutement des apprentis au sein des collectivités.
Certains élus pourront y voir là des opportunités à court terme pour faciliter la gestion de leur collectivité dans une perspective gestionnaire de compétition et de différenciation des
territoires, voire de clientélisme. Le gouvernement affirme d’ailleurs avoir le soutien des élus locaux pour la mise en oeuvre de la loi.
Cette loi vise à rendre la plus lisse possible une privatisation massive des services publics locaux que l’État pourra fortement contraindre, même contre l’avis éventuel des élus. La soutenir
constitue un calcul dangereux.
Les recettes du CNFPT, diminuées depuis 2016, sont encore plus violemment attaquées avec la menace de l’amputation des ressources consacrées à la formation professionnelle pour financer les
dispositifs d’apprentissage. La somme concernée pourrait aller jusqu’à 100 millions d’euros, soit un tiers du budget formation du CNFPT.
La loi de transformation de la fonction publique autorise le gouvernement, dans un délai de 18 mois, à prendre, par ordonnance, toute mesure pour organiser le rapprochement des établissements
publics qui concourent à la formation des agents publics, modifier leur financement et réformer les modalités de formation.
Le processus de casse de la formation professionnelle se continuera donc après le vote de cette loi.
La rémunération des fonctionnaires est bloquée depuis 2010 par la non-revalorisation de la valeur du point d’indice de la Fonction publique, à l’exception d’une faible augmentation en 2016/2017,
largement insuffisante : elle est néanmoins le fruit d’une lutte inlassable de nos fédérations CGT inter-versants (État, Hospitalière et Territoriale) pour obtenir le dégel du point !
Malgré un léger sursaut en 2016/2017, la CGT rappelle que l’augmentation de 1,2 % en deux temps qui a fait passer la valeur du point de 4,630 € à… 4,658 € ! Soit 28 centimes bruts après 6 ans de
gel des rémunérations. La valeur du point d’indice est à ce jour toujours bloquée et le gouvernement a annoncé son gel au moins jusqu’en 2022. De plus, les pertes de pouvoir d’achat accumulées
depuis 2010, voire depuis 1983, quand la valeur du point d’indice n’a plus été indexée sur l’évolution du coût de la vie, sont confirmées. D’autant que, dans le même temps, la contribution
retraite a augmenté de 2,09 %, la CSG a subi une hausse de 1,7 %, à compter du 1er janvier 2018, soi-disant compensée par la suppression de la contribution exceptionnelle de solidarité (CES).
Mais cette suppression ne compensant pas entièrement son augmentation, une indemnité compensatrice est créée sur le fondement de l’article 113 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017.
Elle est attribuée à compter du 1er janvier 2018 aux agents publics dans les conditions prévues par le décret n° 2017-1889 du 30 décembre 2017 dont les modalités d’application sont précisées par
une note d’information du 14 décembre 2017 et par une circulaire interministérielle du 15 janvier 2018.
Les bénéficiaires de cette indemnité sont les fonctionnaires titulaires et stagiaires ainsi que les agents contractuels de droit public, sous certaines conditions portant sur la date de
l’exercice des fonctions.
Les vacataires, collaborateurs occasionnels du service public et autres intervenants ponctuels, n’exerçant pas à ce titre une activité principale, ne bénéficient pas de l’indemnité. Les agents
publics non assujettis à la CSG ne la perçoivent pas non plus (circulaire du 15 janvier 2018).
Les 5,6 millions d’agents de la Fonction publique ont perdu entre 10 et 15 % de leur pouvoir d’achat en cinq ans, soit environ 200 € à plus de 800 € par mois selon la catégorie et l’ancienneté
dans la carrière !
Le Régime Indemnitaire tenant compte des Fonctions, des Sujétions, de l’Expertise et de l’Engagement Professionnel est devenu, depuis décembre 2016, le nouvel outil indemnitaire de référence en
remplaçant la plupart des primes et indemnités qui existent dans la fonction publique territoriale.
Avec les restrictions budgétaires que nous connaissons, le RIFSEEP va accroître les inégalités entre les agents et favoriser la recherche de la performance individuelle et non plus l’intérêt
collectif pour l’exercice des missions de service public auprès de la population. Cela est d’une injustice et d’une inégalité profonde pour les agents « diviser pour mieux régner ».
De plus, la plupart de ces primes ne comptent pas dans le calcul de la retraite.
Pour les agents et l’immense majorité des Français, l’augmentation de la CSG, la baisse des APL, l’augmentation des prix de l’énergie, la stagnation des salaires, la désindexation des retraites,
le retour de l’inflation sont autant d’éléments qui prouvent que la situation, loin de s’améliorer, se détériore, contrairement aux affirmations du gouvernement sur l’augmentation du pouvoir
d’achat.
La loi de transformation de la fonction publique remet en cause l’article 7-1 du statut de la fonction publique territoriale en mettant fin, au nom de l’harmonisation du temps de travail, aux
régimes dérogatoires à la durée légale (1607 heures annuelles) antérieurs à 2001, mis en place dans plusieurs collectivités et établissements publics.
Cette loi impose aux collectivités concernées la redéfinition de nouveaux cycles de travail, par délibération et dans « le respect du dialogue social local », c’est-à-dire, souvent, une simple
information aux représentants du personnel.
L’employeur dispose d’un délai d’un an à compter du prochain renouvellement de leurs assemblées délibérantes pour définir les règles relatives au temps de travail de leurs agents, soit :
- au plus tard en mars 2021 pour le bloc communal ;
- en mars 2022 pour les départements et en décembre 2022 pour les régions.
Reste à savoir comment pourront être conciliées les 1 607 heures avec un nombre de jours fériés variables d’une année sur l’autre, avec les horaires atypiques de plus de 30 % des agents et avec
un temps de travail hebdomadaire à 35 heures.
la Fonction publique du 6 août 2019 modifie profondément les modes de fonctionnement et les prérogatives des « comités techniques et CHSCT » en leur substituant une instance unique : le Comité Social Territorial. Le bilan social et le rapport sur l’état des Collectivités, qui étaient obligatoirement présentés en Comité technique tous les deux ans, sont supprimés au profit du Rapport Social Unique qui devra indiquer les moyens budgétaires et en personnel dont dispose la collectivité. Ce rapport, qui est davantage tourné vers les questions budgétaires, ne reflétera pas l’état réel des collectivités et des conditions de travail des agents. Il devra être présenté tous les ans en CST à partir du 1er janvier 2021. Cette loi affaiblit les missions des instances médicales placées auprès des centres de gestion, mais aussi de la médecine agréée et préventive, « en rationalisant leurs moyens d’action ». Cette disposition sera applicable par ordonnance. La loi supprime l’application de la journée de carence pour les arrêts maladie liés à l’état de grossesse et crée un nouveau droit aux congés pour les proches aidants.
La loi de transformation de la fonction publique supprime et fusionne les CT et CHSCT dans une instance unique compétente pour l’ensemble des sujets intéressant le collectif de travail : le
Comité Social Territorial (CST).
Le CST ajoute aux compétences actuelles des CT celles des CHSCT relatives à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des agents dans leur travail, à l’organisation et aux
conditions de travail et au respect des prescriptions légales y afférentes.
Sous certaines conditions, une « formation spécialisée » dédiée à la santé, la sécurité et les conditions de travail (les questions de réorganisation de service sont traitées dans le comité
social) peut être créée au sein de ces comités.
La loi affirme le rôle « stratégique » du CST sur les politiques de ressources humaines en matière de gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois, des compétences et des parcours
professionnels en ajoutant les questions de recrutement, de formation, de mobilité, de promotion, d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de handicap, liées au parcours
professionnel.
C’est donc plus qu’une fusion CT/CHSCT puisque le CST absorbe certaines prérogatives actuelles des CAP avec des « lignes directrices de gestion » déconcentrées mais sans réels moyens pour les
assumer.
La fusion CT/CHSCT par la création du CST aura pour conséquence d’affaiblir et de diluer dans une instance fourre-tout la réflexion, l’analyse et le travail à mener sur des questions très
différentes et dont l’enjeu nécessite une approche et des moyens qui ne sauraient être édulcorés. Alors que les conditions de vie et de santé au travail des agents se dégradent par l’augmentation
des charges de travail, les réorganisations permanentes, le manque de reconnaissance et la perte de sens, que les questions d’hygiène et de sécurité sont prégnantes, que des moyens en matière de
lutte contre le harcèlement, les violences sexistes et sexuelles sont indispensables, la suppression des CHSCT constitue un recul inacceptable. Supprimer l’instance CHSCT obligatoire, c’est
supprimer ses prérogatives, son budget dédié et ses représentants formés et techniciens, et le rôle essentiel qu’il joue dans la protection, la santé et la sécurité des personnels !
La loi recentre également les attributions des CAP en les vidant d’une très grande partie de leurs compétences et prérogatives. L’avis des CAP sera supprimé sur les questions liées aux mutations,
aux mobilités, à l’avancement et à la promotion interne. Ne subsisteront donc que les CAP relatives à la situation individuelle (recours, révision du compte-rendu d’évaluation) et à la
discipline.
Le patronat, soutenu par tous les gouvernements successifs, ne cesse de s’attaquer aux conquis issus du Conseil National de la Résistance (CNR) et au programme basé sur « un plan complet de
sécurité sociale visant à assurer à tou.te.s les citoyen.ne.s des moyens d’existence dans tous les cas où ils seraient incapables de se les procurer par le travail, avec la gestion appartenant
aux représentants des assurés et de l’État… Une retraite permettant aux vieux travailleurs de finir dignement leurs jours » et la Loi dite de « généralisation de la Sécurité sociale » du 26 mai
1946 qui en a découlé.
Les attaques constantes contre la Sécurité sociale n’ont alors jamais cessé et le système de retraite par répartition a subi des modifications conséquentes depuis 1993, entre augmentation des
taux et allongement des durées de cotisation et de l’âge requis pour cesser toute activité salariée.
Toujours dans l’optique de transformer notre société en supprimant les principes de solidarité, le projet gouvernemental vise à faire passer l’ensemble des régimes de retraite existants sur un
seul système par points, un régime unique individuel !
Supprimer ces principes entrainera inéluctablement une grande majorité de la population vers un avenir des plus incertains, la paupérisation des futurs retraités ne fera que s’accroître.
Ce système de retraite s’inscrit dans un projet de société construit sur le modèle libéral :
- il met en place un mécanisme purement gestionnaire et comptable de la retraite,
- il est destiné à faire des économies sur le dos des salariés, malgré ce que martèle le gouvernement, en accélérant la baisse de leur pension, et en reculant l’âge d’accès à une retraite pleine
et entière, avec un âge réel de la retraite à 64 ans, voire 65 ans.
Les points acquis pendant la vie professionnelle ne garantiront pas un niveau de pension suffisant. La valeur du point au moment de la retraite sera tributaire de la conjoncture économique, de
l’équilibre budgétaire, de l’espérance de vie par génération.
Le retraité partant à l’âge légal de 62 ans, même avec une carrière complète, n’aura pas les moyens de vivre dignement sa retraite. Le libre choix dans ces conditions est un leurre.
Aujourd’hui, la retraite des fonctionnaires est calculée à partir du même montant pour tous les agents ayant le même grade et le même échelon et sur les 6 derniers mois de leur carrière. Demain,
avec le système universel de retraite par points, ce serait le salaire moyen de l’ensemble de la carrière qui serait pris en compte : les mauvaises années vont être comptabilisées (les plus
petits salaires de la carrière, le temps partiel subi, les périodes de chômage ou de précarité…), ce qui conduira forcément à une chute des pensions et à une double peine pour les femmes, les
malades ou invalides, les jeunes précaires ou les privés d’emploi.
En supprimant les 42 régimes de base et complémentaires existants, qui prennent en compte toutes les spécificités professionnelles et réparent les inégalités ou les contraintes particulières des
différents métiers, c’est l’ensemble des dispositifs de départs anticipés (carrières longues, pénibilité, handicap, amiante…) qui seront beaucoup moins favorables.