Licenciements : la CGT tire à nouveau la sonnette d’alarme

La CGT a présenté mardi 27 mai 2025 sa carte de France des plans de licenciement. Une liste noire actualisée un an après la première alerte, et qui compte aujourd'hui près de 400 plans, contre 130 en mai 2024, soit entre 157 903 et 244 655 emplois supprimés ou menacés depuis septembre 2023. La liste n'est pas exhaustive.  Cette carte révèle un territoire national sinistré, à rebours d'un président de la République infatué qui vantait son bilan économique lors du huitième sommet Choose France organisé à Versailles le 19 mai.


Devant un parterre de 200 patrons étrangers, Emmanuel Macron a annoncé 37 milliards d'euros d'investissements étrangers, dont 20 milliards pour de nouveaux projets censés générer 13 000 emplois. En passant sous silence les investissements des entreprises déjà implantées en France. Or, dans la métallurgie, l'automobile, la chimie, le commerce, les banques, chez ArcelorMittal, Michelin, Novartis, Vencorex, Jenyfer, la casse sociale s'accélère. Dans la culture, 150 000 emplois sont menacés par les coupes budgétaires.

 

Échec de la politique de l'offre

La politique de l'offre menée par Emmanuel Macron a échoué à inverser la désindustrialisation en œuvre depuis plusieurs décennies. Au point qu'aujourd'hui, l'industrie représente 11% seulement du PIB, contre 20 % au milieu des années 80. « La désindustrialisation a été organisée par le patronat et les gouvernements successifs. Dans la métallurgie, toutes les filières sont touchées, y compris l'aéronautique où les carnets de commande sont pleins jusqu'en 2030, et où pourtant, Airbus annonce un millier de suppressions d'emplois. ArcelorMittal demande une aide de 800 millions à la Commission européenne pour décarboner ses sites, mais à quoi ont servi les aides publiques que le groupe a déjà touché ? », interroge Frédéric Sanchez, le numéro un de la CGT métallurgie lors d'une conférence de presse organisée le 27 mai. Dans la chimie, le recensement est tout aussi macabre, avec « plus de 80 plans antisociaux aujourd'hui. Pas une de ces entreprises n'est en difficulté financière », dénonce Serge Allègre, secrétaire fédéral de la CGT-chimie.

 

Une mort programmée

Et dans bon nombre de situations, les militants syndicaux observent que les entreprises organisent leur propre mort, par le jeu de montages comptables et fiscaux plus ou moins complexes. « On crée la propre faillite de l'entreprise. On n'envoie plus de stocks dans les magasins, on ne les rénove plus, on ne renouvelle plus les collections… Ensuite, on se sert de la chute du chiffre d'affaires pour justifier des plans sociaux. Rien qu'en 2023, 4 000 emplois ont été supprimés dans le commerce de l'habillement chez Pimkie, Kookaï, Gap… C&A en est à son huitième PSE depuis 2017. Jenyfer a eu un premier PSE en 2021, puis un deuxième en 2023 et aujourd'hui, la société est en liquidation judiciaire (près d'unmillier d'emplois concernés, ndlr) », se désole Elodie Ferrier, de la CGT commerce et services. « Ces plans de licenciement, aggravés par les politiques d'austérité du gouvernement, sont pour une majorité d'entre eux le fait de grandes entreprises qui réalisent des bénéfices, distribuent des dividendes et qui touchent énormément d'aides publiques », dénonce Sophie Binet, la secrétaire générale de la CGT.

 

Le choix du chômage

Parfois, la mobilisation homérique des salariés et des syndicats, entre autre de la CGT permet d'éviter le pire, comme aux Fonderies de Bretagne, à Valdunes ou Duralex… « Mais ces belles histoires, construites à la sueur de notre front, sont malheureusement une exception. La règle, c'est que le patronat et le gouvernement font systématiquement le choix du chômage », réprouve Sophie Binet, qui se dit « animée par une énorme colère parce que depuis un an, quasiment systématiquement, les projets des salariés sont balayés ». En témoigne Vencorex, qui concerne 6000 emplois directs et indirects. La CGT a d'abord porté un projet de nationalisation, puis un projet de reprise sous forme de Société Coopérative d'Intérêt Collectif (SCIC) avec des élus locaux. « On avait réussi à trouver 45 millions d'euros d'investissements, à maintenir les 450 emplois directs et la totalité de l'activité avec un industriel indien prêt à s'implanter sur le territoire. Le tribunal de commerce et l'Etat ont préféré un investisseur chinois qui va maintenir 34 emplois », témoigne Serge Allègre. « Le gouvernement refuse d'utiliser les leviers dont il dispose et organise lui-même sa propre impuissance, renchérit Sophie Binet. Il refuse aussi d'agir au sein des groupes dont il est au capital comme à STMicroelectronics. Le gouvernement a annoncé 2,9 milliards d'aides publiques, STMicroelectronics s'était engagé à l'époque à créer 1000 emplois. Aujourd'hui, la même entreprise nous annonce 2 à 3000 suppressions d'emplois et le gouvernement n'a toujours pas levé le petit doigt pour s'y opposer ».  La numéro un de la CGT fait les comptes : « 37 milliards d'investissements ont été annoncés lors du sommet Choose France pour générer 13 000 emplois. Soit 2,85 millions d'euros par emploi. A ce prix-là, mieux vaut créer des emplois de fonctionnaires dans nos hôpitaux, nos écoles, nos universités qui sont à l'os ».

 

Appel à mobilisation le 5 juin 2025 et au-delà

 

La CGT revendique notamment un moratoire sur les licenciements, la révision de la loi Florange pour obliger à rechercher un repreneur à partir du seuil de 50 salariés ; le conditionnement des aides publiques à un avis conforme des comités sociaux et économiques (CSE) ; une réforme des tribunaux de commerce ; la mise en place d'un juste prix de l'énergie pour sortir de la spéculation ; la modulation des droits de douane en fonction des normes sociales et environnementales ; la mise en place d'une cellule de crise en soutien à l'emploi et aux projets des salariés. La CGT appelle à la mobilisation dans les entreprises et dans la rue le 5 juin pour les retraites et les emplois.