Échec du conclave : la réforme doit être abrogée !

La CGT a quitté le conclave des retraites il y a trois mois. Quel regard portez-vous sur la manière dont ont évolué les négociations avec les syndicats restants (CFDT- CFTC-CFE-CGC) ?

 

La CGT est partie mi-mars. Or la situation, c'est toujours qu'il n’y a pas abrogation de la réforme des retraites. Depuis le début nous avons dit que nous étions là pour défendre l’abandon de la réforme, c’est-à-dire parler de revenir à l'âge légal de 62 ans. C'était la revendication de l’intersyndicale entière au début 2023. Donc là, la raison pour laquelle on a claqué la porte, c’est qu’on nous a fermé la possibilité de discuter du sujet principal. Les questions de pénibilité découlent du fait qu’on décale le départ en retraite de deux ans. Tenir un marteau-piqueur à 62 ans, c’est déjà insupportable, alors à à 64 ans… De même, le travail de nuit pour une infirmière à 62 ans, c’est encore pire à 64 ans. Les questions qui découlent de tout cela ne peuvent se résoudre que par l'abrogation, voire par une amélioration, comme on le revendique avec des départs anticipés dès 55 ans.  C'est donc un point majeur. Des réunions qu’on a pu tenir au moment du conclave, on a pu retenir un certain goût du secret. Et finalement on aboutit à des propositions de textes où ils n’arrivent même pas à se mettre d’accord, sur des miettes. Et quand je dis des miettes, il y a même des choses dangereuses qui pourraient arriver.

 

Lesquelles  ?

 

D’abord la question de l’âge.  Officiellement, il est marqué qu’on ne touche pas à l’âge de 64 ans. Mais par contre, il est prévu une disposition qui dit qu’on pourrait quand même regarder si on n’adapte pas l’âge en fonction decla démographie et donc finalement mettre un âge variable de départ, évidemment plus tard que 64 ans, 64 et demi, 65 et 66, si la population vieillit. Ça c’est totalement inacceptable. C’est-à-dire qu’ils ne se sont pas contentés de maintenir les 64 ans, mais en plus ils introduisaient une possibilité d’alourdir !

Un autre point paraît aussi très étrange, c’est la référence à la gouvernance de l’Agirc- Arrco.(le régime des retraites complémentaires, NDLR). Cela parait technique et difficilement compréhensible pour le grand public, mais se caler sur le modèle des retraites complémentaires signifie une gouvernance d’abord par les finances et qui détermine les droits selon les moyens disponibles. Ceci, bien sûr, sans toucher aux cotisations, notamment patronales, puisque c’est un dogme, on ne l’augmente pas.

Donc, le risque est que cela serve à baisser les droits, là aussi, et notamment en introduisant une sous-indexation des pensions. Cela revient à faire en sorte qu'à chaque fois que l’inflation augmente, on revalorise les pensions de retraite en dessous de cette inflation.

Il y a aussi la question de l’égalité femmes-hommes. Avec la réforme, l'impact des majorations de durée d'assurance (accordée quand on a des enfants) sera moindre du fait de l'allongement de deux ans du départ en retraite.  Et du coup, on propose d’augmenter la pension des femmes,  mais en rabotant le dispositif carrières longues. C'est-à dire que pour une légère amélioration de la situation de 5000 personnes environ, on va priver 60 000 autres du droit à une retraite anticipée quand ils ont commencé à travailler à 19 ou 20 ans !

 

Il y a quand même en discussion des points positifs comme l'abaissement de l'âge de la décote…

 

De 67 ans à 66 ans ou à 66,5 ans… C'est ridicule.  En résumé, la CGT dénonce depuis le début le fait que cette concertation ne permet pas de discuter de l'essentiel, à savoir le recul des bornes d'âge. Sur ce point, nous continuons de réclamer un vote au Parlement sans 49.3, qui permette d'aborder vraiment du fond, ou alors avec un référendum. Le reste ne pourra se discuter dans ce cadre-là, car de ce conclave ne sort que soit des miettes sur la pénibilité et l'égalité femmes-hommes, soit des reculs nouveaux tel que le rabotage du système carrières longues. Or ces changements seront facturés très cher aux retraités au travers une sous-indexation des pensions. De manière chiffrée, les retraités devront payer 6 milliards par an contre des améliorations de l'ordre de 1 milliard d’euros par an.  Cette tentative de conclusion du conclave montre que Bayrou est très inquiet pour son avenir politique.